Les Fô Ndzijouo et Fô Touoyem II ont régné à Babadjou pendant la période du Cameroun sous protectorat allemand
Ce
Qui Rend Cette Partie De Notre Histoire Inaccessible, Est E Fait Que Les écrits
Soient En Langue Allemande Encore Difficile à Décrypter Et La Rareté Des
Documents. Dans Cette Période Choisie, Nous Remarquons Un Peuple Instable Qui
Au Départ Oppose Des Résistances Aux Colons Européens Et Par La Suite Va Donner
Collaborer Avec Ces Derniers. Déjà Dans Le Ntang La’ No 14 On
Traitait L’histoire De Babadjou Jusqu’à Fô Ndzijouo, Promettant Continuer Dans
Les Prochains Numéros Après Plus De Recherches Sur Le Sujet.
Bien Qu’arrivés Au Kamerun En 1884, C’est En 1902 Que Les Allemands Arrivent à Babadjou Après La Construction De La Station Militaire De Bamenda La Même Année. A Leur Arrivée, Ils Sont Tout D’abord Impressionnés Par L’exploitation Du Sol à Babadjou Et Les Cultures (de Subsistance) Qui Y Sont Produites. Babadjou, Situé Sur La Ligne De Conquête Du Nord Est, Faisait L’objet De Convoitise Des Allemands. C’est Dans Cette Optique Qu’une Expédition Conduite Par Le Premier Lieutenant Strümpell Dans La Partie Sud Du District De Bamenda Arrive à Babadjou Le 15 Mars 1902 Dans Le But De Découvrir Cette Terre Encore Inconnue Par Les Allemands
Après Un Bref Séjour Amical (ndlr: Dont L’explorateur Allemand Ne Précise Pas La Durée) à Babadjou, Strümpell Et Sa Suite Regagnèrent Le Poste De Bamenda. Fô Ndzijouo Avec Eux, Et Firent Part Des Merveilles Des Villages Visités, Entre Autre Babadjou. C’est Dans Le But De Mettre Ces Nouvelles Terres En Valeur Qu’une Seconde Expédition Conduite Par Le Lieutenant Hirtler, Chef De La Station Militaire De Bamenda, Arrive à Babadjou Le 26 Février 1903, dans Le but De Négocier Avec
Fô
Ndzijouo (de Retour Déjà De Bamenda) La Route Qui Devait Relier Le Poste De
Bamenda à Celui De Dschang, Passant Par Babadjou. Le Chef Donna Son Accord
Après Une Journée De Négociation Avec L’officier Allemand. Notons Qu’à
L’annonce De L’arrivée De L’officier Allemand, Le Chef Lui Réserva Un Accueil
Chaleureux. Les Vivres Ont été Apprêtés Et Des Femmes Qui Prendront Soin Du
Visiteur. Ce Comportement Du Chef N’était Pas Signe De Peur Du Colon, Mais
Plutôt D’hospitalité. L’officier Allemand Est émerveillé Surtout Par Ce Grand
Arbre Aux Fruits Noirs Appelé «mbeuh», Ressemblant Aux Prunes
Et Se Consommant Cuits, Très Appétissant, Mais Pourtant Sans Condiments.
Parmi
Les Plans Des Allemands à Babadjou On Peut Noter L’idée De Propagation De
L’évangile, La Construction De La Route Bamenda-Dschang Et La Construction De
La Route Lancée Depuis Bamenda En Juin 1904 évolue Sans Heurts. Seulement Les
Travailleurs Babadjou Mis à La Disposition Des Allemands Sont Maltraités. Peu
De Temps Après, Les Nouvelles Des Maltraitances Des Allemands à L’endroit Des
Travailleurs Parvinrent à Fô Ndzijouo Et C’est Ainsi Qu’une Fois La Route
Construite Jusqu’à Babadjou, Le Chef Ordonna Ses Sujets à Abandonner Les
Travaux, Donna L’ordre Aux Femmes De Cesser Avec L’approvisionnement Et
S’opposa Lui-même Contre Le Passage De Cette Route Sur Son Territoire. C’est
Ainsi Qu’en Septembre 1904 La Construction De La Route Est Interrompue. Après
Moult Tractations, Aucune Issue Favorable Ne Fut Trouvée, Ce Qui Passa D’une
Simple Désobéissance Civile à Une Lutte Armée. Le 11 Septembre 1904, Le
Lieutenant Putlitz, Chargé De Diriger Les Travaux, Est Mis En Mal à Babadjou Et
Se Trouve Obligé De Battre En Retraite: C’est Ce Soulèvement Que Le Colon
Allemand Appelera Désormais La Résistance Babadjou.
Dans Ce Grand Désordre, Certains Babadjou Trouvèrent Refuge Dans Es Villages Voisins. La Station De Bamenda Lança Un Cri De Secours à La Station De Fontemdorf (Dschang), Qui Lui Vint En Renfort. En Novembre 1904 L’officier Allemand Kouobloch, Accompagné Du Lieutenant Rausch Se Rendit à Babadjou
pour
Mettre Fin Au Soulèvement. Une Fois La Situation Apaisée, Il Fallait Faire
Payer Aux Babadjou Le Prix De Leur
Insoumission Et Du Tort Causé. Courroucés, Les Allemands Se Décidèrent De
Déporter Le Chef Fô Ndzijouo Au Poste De Bamenda Pour Un Châtiment Exemplaire.
N’étant Pas à La Première Expérience De Déportation Et Conscients Des Sévices
Qui Allaient Lui être Infligés Au Fort De Bamenda, Il Décida Donc De Prendre La
Fuite. C’est Donc Où Un Soldat Bali, Travaillant Aux Côtés Des Allemands Lui
Place Une Balle Dans Le Dos Et Le Chef Tomba Les Armes à La Main, Sous Le
Regard De Ses Sujets Cachés Dans La Brousse. Dans Un Rapport Du Chef De Station
De Bamenda Adressé Au Gouvernement Impérial Le 1er Avril 1905,
Hitler Rapporte Les Faits Comme Suit: «Pendant Sa Déportation Au Fort De
Bamenda Où Il Allait Purger Sa Peine Conformément à Sa Faute, Le Chef
Insubordonné Tenta La Fuite Et Un Bali, Sans Attendre L’ordre, Tira Sur Ce
Dernier.» (Ndlr: Traduit Du Texte Original En Allemand
Obtenu Aux Archives Nationales De Yaoundé). La Tradition Orale Rapporte Qu’une
Bonne Partie De La Population Fut Appelée à Abattre Un Grand Arbre (Teu Mbeuh)
Qui Empêcherait Le Passage De La Route Et
De Le Soutenir à Sa Chute De Sorte Qu’il Ne Perde Aucune De Ses Feuilles.
Ce Spectacle Inouï Se Déroulait Au Lieu Dit Metaa Touo’ Et Sous Le Regard Du
Chef Qui à La Chute De L’arbre A Donné L’ordre à La Population De S’enfuir Dans
La Brousse. Elle Parle également De La Fusillade Du Chef Juste Après Qu’il Ait
Donné L’ordre. Certes L’officier Allemand A Déjà Parlé De Cet Grand Arbre, Mais
Avait-il été Demandé Aux Populations De L’abattre Et De Le Soutenir Avec Leurs
Mains à Sa Chute? Cette Autre Version Nous Paraît Moins Vérifiée, Car
Comment Les Allemands Qui Avaient Besoin De Main-d’œuvre Et De Porteurs
Auraient Plutôt Choisi De Sacrifier Les Hommes Pourtant Sous D’autres Cieux Ils
Les Mettaient à Leur Compte Pour Des Tâches Ci-haut Citées?
Pour Le Remplacer, Le Jeune Chef, Fô Touoyem II Est Désigné Malgré Son Jeune âge Pour Présider Aux Destinées Du Village Plongé Dans La Tourmente. Le Jeune Chef Arrive Donc à Un Moment Où Le Village Entier Est épris De Peur Après
l’assassinat
De Son Prédecesseur. Conscient Des Dangers Qui Le Guettaient Et Des Risques
Qu’il Courrait S’il Tenait Tête à Ses Nouveaux Maîtres, Le Chef Entreprit De
Collaborer Avec Ces Derniers, Même Si Ce
N’était Pas Une Vraie. C’est Ainsi Qu’en
Janvier 1905 Les Travaux De Construction De La Route Reprirent. Entre Temps Se
Développa à Babadjou La Psychose Du Blanc Et Pour Sanctionner Cet Acte Ignoble
Posé Par Ces Derniers, Les Notables Du Village Se Réunirent Et Organisèrent Un
Rite De Condamnation Du Blanc Ainsi Que Tout Fils Babadjou Qui Tentera De
Suivre Un Pan Mekou. C’est Ce Fameux Rite Au Cours Duquel Un Chien Noir Fut
Enterré Vivant Avec Bien D’autres Objets De Parjure. Notons Que L’élite A
Tellement été Psychologiquement Influencée Par Cette Malédiction Que Des
Cérémonies Furent Organisées à Babadjou En 1973 Pour Annuler Ce Serment.
C’est Donc Sous Le Règne De Fô Touoyem II Que Les Allemands Réalisent Avec Succès Leurs Projets à Babadjou. Il Favorise
L’implantation Du Christianisme à Babadjou En Se Convertissant Lui-même Au
Christianisme. Entre 1909 Et 1910, Il Autorisa La Construction D’une église à
Babadjou (l’actuelle église Catholique De Toumaka). Le Peuple Adhère Mal à
Cette Nouvelle église Et Ne L’accepte Pas. Pour L’imposer, Les Allemands Avec
L’appui Du Chef Accordaient Certains Privilèges à Ceux Qui Se Convertissaient
Au Christianisme. Il Leur était Offert Vêtements Et Autres Cadeaux Précieux.
Puisque Ces Convertis étaient En Retour Rejetés Par La Société, Les
Missionnaires Créèrent Donc Des Camps De Chrétiens, Pour Que Ces Derniers Ne
Soient Plus Menacés Par Les Non Convertis. Outre Mesure De Pression, Les
Chrétiens étaient épargnés Des Travaux Dans Les Plantations Et Du
Portage; Seuls Ceux Qui Refusaient De Se Convertir En Devaient Subir.
C’est Donc Pour Cette Dernière Raison Que Beaucoup De Personnes Prirent
L’initiative De Se Convertir Au Christianisme Leur Gré Malgré. Cela S’explique
De Nos Jours Par Les Syncrétismes à Babadjou, à Savoir Le Culte Des Ancêtres Et
Le Christianisme. Ceci Montre Que La Collaboration Sous Le Règne De Fô Touoyem II N’était Qu’une Collaboration Voilée.
Article Réalisé Par Serge Roland Ndjowe Et Darios Kamta TCHIFFO