Celui-ci, existe chez les bamilékés bien avant l’avènement du christianisme. Selon cette religion, «ceux qui sont morts ne sont jamais partis... les morts ne sont pas sous la terre. Ils sont dans l'arbre qui frémit, ils sont dans le bois qui gémit, Ils sont dans l'eau qui coule. Ils sont dans l'eau qui dort. Ils sont dans la case, ils sont dans la foule. Les morts ne sont pas morts. En fait, ils sont dans un monde spirituel et à partir de là, veillent sur tous leurs proches, descendants qui sont encore sur terre. Ainsi, nos morts ne sont pas morts. Ils sont bel et bien vivants, et à partir du monde spirituel ou ils sont, ils continuent même de s'intéresser à nous, leurs proches et descendants encore sur terre. Il est possible de les contacter spirituellement afin qu'ils intercèdent auprès de l'Esprit divin universel en notre faveur pour nous soutenir ou nous aider à résoudre un problème quelconque que nous rencontrons sur terre, par exemple la santé, les enfants, les bonnes récoltes et bien d’autres.
Dans la spiritualité bamiléké la communication avec les ancêtres à travers leurs cranes est sacré et se déroule à travers la conservation des cranes des défunts ainsi que tout objet matériel, qui a été pendant longtemps en contact direct avec un défunt de son vivant, et fortement imprégné de son essence spirituelle propre et donc est un excellent moyen pour faciliter l'harmonie et le contact intérieur avec son âme et le monde des ancêtres. Entrer en contact avec eux se fait grâce à l’os crânien, car l'os humain est considéré non seulement comme l'une des choses matérielles qui, pendant que nous sommes sur terre, nous appartient le plus intimement, mais celle aussi qui va survivre le plus longtemps après la mort. La tête est la partie la plus supérieure de notre corps et est traditionnellement associée à l’esprit, a la pensée, à la conscience et à l’âme, à cause de sa correspondance avec les parties supérieures de l’être. En effet, s’ils reconnaissent que Dieu peut être atteint grâce à ses anges (culte des divinités), ils pensent aussi que leurs ancêtres décédés peuvent intercéder auprès du divin pour leur cause. La préservation de cranes comme reliques se pratique donc ainsi qu’il suit: quelques mois ou plus souvent quelques années après l'enterrement du défunt, lors d'une cérémonie spéciale dirigée par un initié, on recreuse la tombe pour déterrer uniquement son crâne qui ira se reposer désormais dans la case sacrée réservée à cet effet sous la garde d’un héritier légitime. C’est dans cette case qu’éventuellement on viendra avec quelques présents symboliques comme l’huile, le « Ndindim » ou encore le jujube, la kola, le pistache, l’huile de palme, le sel et parfois une chèvre ou une poule peut être égorgée comme sacrifice adresser nos prières d’intercession a un défunt en particulier et le plus souvent à tous les défunts. Il faut noter que c’est le crâne d’une personne ayant fait ou accompli de grandes réalisations qui est déterré. Les ancêtres sont en fait considérés comme des intermédiaires entre Dieu et les Vivants, ils sont profondément impliqués dans les affaires des vivants car ils sont les gardiens de la famille et agissent comme police invisible de la famille et de la communauté. Si après la mort d’un individu les initiés (kam-si) constatent que celui-ci était un sorcier malfaiteur alors il ne pourra jamais être élevé au rang des ancêtres et par conséquent ne bénéficiera d’aucun culte, ni respect. Ceci revient à dire que la famille de ce dernier n’organisera point ses funérailles car c’est cette cérémonie qui marque l’intégration du défunt dans le collège des ancêtres de la communauté et le repos dans la paix des ancêtres. Alors, selon les bamilékés, la mort n’existe pas, on quitte simplement le monde terrestre pour un autre monde, celui des ancêtres.
La préservation des Crânes comme reliques figure à notre avis parmi les plus beaux joyaux de la spiritualité bamiléké. Les religions importées et tous leurs complices ont tenté en vain de le couvrir de boue dans le but de ternir son éclat afin de mieux imposer leur point de vue. Cette préservation de reliques leur aura survécu. Et aujourd’hui nous nous devons de restaurer son éclat originel. Nous nous devons de redorer son blason. Ces reliques constituent l’une des "vérités" qui nous identifient et nous singularisent le plus parmi tous les peuples de la terre. Nous devons prendre ou reprendre conscience de tout ce qui fait notre spécificité spirituelle propre, l'endosser ensuite fièrement et le projeter fortement vers tous ceux qui croisent notre chemin.